Et d’être finalement l’auteur de Jean Santeuil. L'éditeur Bernard de Fallois est mort le 2 janvier 2018. Il était évident qu’il manquait des cahiers. C’était une femme profonde et discrète. Bernard (Marie Michel Édouard) de Fallois, est le petit-fils d'Armand de Fallois, officier de l'Armée de terre française. « La fin est un commencement ». 2 Marcel Proust, Contre Sainte-Beuve, suivi de Nouveaux mélanges, préface par Bernard de Fallois, Paris, Gallimard, 1954. N. M. D. – Comment avez-vous découvert Jean Santeuil ? 09/03/2010, LE Il m’invita à venir le voir, me reçut avec la gentillesse, la courtoisie et les égards que seuls les hommes très intelligents réservent aux jeunes gens, et après m’avoir écouté, il me proposa de téléphoner à Suzy Mante-Proust13 et de lui demander de me recevoir. Il pourra « faire du Charlus », et aussi du Norpois, du Guermantes, etc. Simenon, Bernard De Fallois, Gallimard. Il est l’auteur de deux livres, et vraisemblablement, de nombreux manuscrits inédits. Bernard de Fallois, exécuteur testamen-taire de Roger Nimier, en soutenait naturel-lement la publication. N. M. D. – André Maurois connaissait-il Jean Santeuil ? 29/03/2009. J’en ai eu la preuve en retrouvant un jour une lettre que Proust avait écrite, lors d’un séjour à Cabourg, à un jeune homme à qui il faisait la cour et qui lui avait posé un lapin21. Il y avait Bergson, bien sûr, mais aussi Alain, Barrès et Gide, Les Thibault de Roger Martin du Gard, la Correspondance de Jacques Rivière et d’Alain-Fournier, Aldous Huxley, les romanciers anglais de cette époque, le Silbermann de Lacretelle, Notre jeunesse de Péguy, les premiers essais de Berl… et naturellement les quinze petits volumes de la Recherche du temps perdu. Vous aviez donc bien conscience que vous reconstruisiez quelque chose qui, d’une certaine façon, n’avait jamais existé ? En arrivant au Livre de Poche, j’avais dit au directeur d’alors, Guy Schoeller, que les couvertures me paraissaient inesthétiques, qu’il fallait y travailler. Pierre Clarac avait refusé votre idée du Contre Sainte-Beuve « roman ». Nouvelles inédites de Proust : du tourment d'être homosexuel. J’ai en quelque sorte deux articles bâtis dans ma pensée (articles de revue). Mais au moment où il avait pris cette décision, il ne le savait pas. Tout cela au milieu des événements, des restrictions, des inquiétudes, des travaux scolaires, des amours, de la vie qu’ont les garçons de cet âge. Bernard de Fallois – À quinze ans, et par le hasard d’une rencontre. On se souvient que Bloch, à qui Proust a prêté par avance tous les arguments qui seraient invoqués contre lui, avait l’habitude de dire : « J’avoue que la peinture de ces inutiles m’indiffère assez. 25 Édition établie par Pierre Clarac et André Ferré, Paris, Gallimard, 1954. Né en 1926, grand professeur, éditeur et lecteur, fondateur en 1987 des Éditions qui portent son nom, Bernard de Fallois est le proustien capital à qui on doit l’invention de Jean Santeuil (1952) et de Contre Sainte-Beuve (1954). 26 À la recherche du temps perdu, préface par Bernard de Fallois, Paris, France Loisirs, « Collection du millénaire », 1999, 3 vol. Voir Correspondance avec sa mère, éd. Mais en regardant ce que je venais de découvrir, j’éprouvai une des impressions les plus fortes que j’ai eues dans ma vie.La légende du jeune oisif était en miettes.Il fallait tout repenser. Les invectives dont Proust l’accablait, il me semblait bien les avoir lues quelque part, et en effet je les ai retrouvées quelques semaines après dans la bouche de Swann. Ph. Photo : Bernard de Fallois au Swann en 2017 . Réécouter Quelle justice au Kurdistan syrien pour juger les djihadistes français? Achetez les produits Bernard de Fallois et profitez de la livraison gratuite en livre. » La lettre a été exposée à la Bibliothèque nationale en 1965 (Catalogue, n° 366). Je leur avais d’abord suggéré de l’éditer en quinze volumes, comme la première édition, de manière très lisible. 03.01.2018 La une Je lui dois beaucoup. […] Et aussi quelques vieilles divinités rudimentaires et féroces, dans leur dessin sommaire n’ont pu changer […] [et] restent immuables dans la hideur barbare de leur effigie lombarde. Mais cet excellent biographe avait eu l’idée simple – simple mais il fallait l’avoir – d’interroger la famille. Proust se serait mis à leur lire un dîner chez Madame Verdurin en étouffant de rire (« non, je ne peux pas publier ça, c’est trop bête ! J’ai un faible pour l’édition de la Recherche que j’ai faite à France Loisirs26, précisément parce qu’elle ne comporte aucune note. Non, très vite après Jean Santeuil les deux traductions de Ruskin sont le moment du recommencement. Proust et son temps devenaient l’objet d’un culte, d’un culte qu’il aurait été le premier à juger hérétique, et qu’il avait par avance dénoncé dans son Contre Sainte-Beuve.En trouvant les pièces qui manquaient à l’histoire de son roman, avais-je contribué à favoriser et à cautionner ce culte ? 18 Voir Corr., t. IX, lettre 78, à Alfred Vallette, [vers la mi-août 1909] : « Je termine un livre qui malgré son titre provisoire : Contre Sainte-Beuve, Souvenir d’une Matinée est un véritable roman. Dernières publications sur Bernard de Fallois. Son signe selon l'astrologie . Nous ne nous quittions pas. Silence rompu par un olibrius nommé Antoine Adam, grande autorité dans le monde universitaire, qui se fendit d’un long article dans une revue lilloise pour dénoncer une imposture, suggérant que j’avais manipulé le texte pour donner une apparence d’unité à des fragments épars. Quant au lecteur, il est temps pour lui de refermer le livre de Bernard de Fallois et d’ouvrir Du côté de chez Swann. 15 « As-tu des renseignements sur la vie de Fromentin ? Cela me surprend quand j’y repense. »Les « généticiens » du texte devaient, vingt ans plus tard, entériner la justesse des intuitions de Fallois quant à l’absorption du projet d’essai critique « contre Sainte-Beuve » dans le cadre fictionnel d’un récit, puis d’un roman. 21 Voir Bernard de Fallois, « Sur une lettre de Marcel Proust », Le Disque vert, « Hommage à Marcel Proust », numéro spécial hors série, Paris/Bruxelles, décembre 1952, p. 11-20. N. M. D. – Aviez-vous conscience avec ces publications de changer la hiérarchie des valeurs littéraires qui avait cours alors… ? Cet aspect est absent de Jean Santeuil, mais en 1908, quand il se met à écrire ses pastiches, à la suite du succès de Reboux et Müller, il comprend sans doute qu’il pourra en tirer parti pour les personnages de son futur roman. Celui d’un jeune homme de famille bourgeoise aisée, de santé fragile, ayant mené jusqu’à la trentaine une vie d’oisif, passionné seulement par les salons et la mondanité, jusqu’au jour où, frappé d’une soudaine illumination, il s’était enfermé dans une chambre aux murs de liège, et avait en quelques années composé À la recherche du temps perdu.Ainsi cette œuvre immense, cette cathédrale, ce monument de la littérature française et mondiale serait tombé du ciel sans aucun signe précurseur, sans travaux préparatoires, comme par magie. Quand, après les feuilles volantes de Jean Santeuil, vous vous êtes attaqué à la masse des cahiers, comment avez-vous procédé ? Tradition et métamorphose (PSN, 2012).nathalie.mauriac[arobase]ens.fr, Voir la notice dans le catalogue OpenEdition, Plan du site – Contact de la revue et responsable du site – Flux de syndication, Nous adhérons à OpenEdition Journals – Édité avec Lodel – Accès réservé, Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search, Bernard de Fallois – « L’histoire d’un roman est un roman », Bidou, Bergotte, la Berma et les Ballets russes, Portail de ressources électroniques en sciences humaines et sociales, Contact de la revue et responsable du site, Catalogue des 554 revues. Elle avait une très grande culture, dont elle ne faisait jamais étalage, elle avait travaillé avant la guerre avec Raoul Dautry, qu’elle admirait. Bernard de Fallois (Author) › Visit Amazon's Bernard de Fallois Page. Le dossier « Albertine disparue », Champion, 2005). AccueilNuméros36EntretienBernard de Fallois – « L’histoire... Né en 1926, grand professeur, éditeur et lecteur, fondateur en 1987 des Éditions qui portent son nom, Bernard de Fallois est le proustien capital à qui on doit l’invention de Jean Santeuil (1952)1 et de Contre Sainte-Beuve (1954)2. Ajoutez-le à votre liste de souhaits ou abonnez-vous à l'auteur Bernard de Fallois - Furet du Nord Elle était entourée d’une légende de phrases trop longues, d’une absence d’intrigue romanesque, et finalement d’un esprit assez éloigné des préoccupations du moment. Je lui demandai conseil. Il vous arrive encore de relire Proust ? 22 Du côté de chez Swann et À l’ombre des jeunes filles en fleurs paraissent au Livre de Poche en 1965, les autres tomes les années suivantes. Il est connu pour avoir été l'éditeur de Marcel Pagnol et de lauteur suisse à succès Joël Dicker, mais aussi Robert Merle, Raymond Aron, Jacqueline de Romilly et, dans le domaine des sciences humaines, Fernand Braudel, Simone Bertière ou encore Charles Zorgbibe. Lui qui possédait une centaine de lettres que lui avait adressées l’écri-vain, témoignait de ce qu’elles étaient souvent marquées par l’esprit du canular car ce ton était son genre. Il n’y a pas eu de solution de continuité. Il ne faut pas oublier non plus que la situation de Proust était très particulière. N. M. D. – En 1960, vous avez quitté votre poste de professeur agrégé et vous êtes entré au Livre de Poche. De quoi l'islamo-gauchisme est-il le nom ? est dans l'appli Radio FranceDirect, podcasts, fictions. We've curated a list of lesser-known films to help you explore the space-time continuum from the comfort of your couch. Bernard de Fallois, Self: Apostrophes. Né le 9 mai 1926, cet agrégé de lettres, issu d'une famille de militaires, a commencé par enseigner. Je ne connaissais peut-être même pas Reynaldo Hahn à cette époque, je ne savais pas – ou j’avais oublié – l’histoire de leur voyage ensemble à Beg-Meil. Wikipedia® est une marque déposée de la Wikimedia Foundation, Inc., organisation de bienfaisance régie par le … Réécouter Chloé Morin : "Il faut réapprendre à confronter nos points de vue sans chercher à anéantir l'adversaire", Chloé Morin : "Il faut réapprendre à confronter nos points de vue sans chercher à anéantir l'adversaire", Réécouter Hervé Le Tellier : "On sort de ce film en se posant la question de ce qui est essentiel et de ce qui va rester", Hervé Le Tellier : "On sort de ce film en se posant la question de ce qui est essentiel et de ce qui va rester", Réécouter Ernest Pignon-Ernest, plasticien autodidacte, amoureux des artistes d'autrefois, Ernest Pignon-Ernest, plasticien autodidacte, amoureux des artistes d'autrefois, Réécouter Des États-Unis à la France, la liberté ou l'Histoire : voyage autour de l'idée de race aujourd'hui, Des États-Unis à la France, la liberté ou l'Histoire : voyage autour de l'idée de race aujourd'hui, Réécouter Narcisse Pelletier, l’aborigène vendéen (1/2) : Le mousse de Saint-Gilles, Narcisse Pelletier, l’aborigène vendéen (1/2) : Le mousse de Saint-Gilles. Nathalie Mauriac Dyer – À quel âge avez-vous découvert Proust ? Très bravement, je téléphonai à Maurois et lui expliquai mon cas. Mais d’un autre côté, si cela ne s’était pas passé ainsi, comment se faisait-il que tant de témoins que je lisais, des témoins toujours vivants, très fiers de l’avoir approché, n’aient pas raconté l’histoire de la naissance de ce chef-d’œuvre ?Car Proust était mort si jeune qu’en 1950 la plupart étaient vivants. B. de F. – Oui, c’était en fusion. En dix-sept chapitres, Contre Sainte-Beuve liait, dans une intuition géniale, l’essai critique amorcé sur des feuilles volantes au cadre (auto)fictionnel de la conversation avec Maman développé ensuite dans sept cahiers ; les grands morceaux critiques sur Balzac, Nerval ou Baudelaire alternaient avec ce qui, rétrospectivement, apparaissait bien comme les premiers « crayons » du roman (« La race maudite », « Noms de personnes »). Admis à compulser les archives de l’écrivain, il mit au point cet essai resté inédit sur Les Plaisirs et les Jours. Après « Combray », après « Un amour de Swann », vient la révélation de la scène finale, ce qui lui permettra d’affirmer par la suite qu’il a écrit la fin de son livre très tôt. Au début des années 1960, il se tourna vers l’édition. Au fur et à mesure je voyais que des épisodes étaient repris, et comment les « morceaux » s’assemblaient et s’organisaient. Bernard de Fallois . 24 Maximes et pensées dans « À la recherche du temps perdu », choisies et présentées par Bernard de Fallois, Paris, France Loisirs, 1989. N. M. D. – Vous avez écrit, dans la préface de votre édition : « Contre Sainte-Beuve au fond n’est pas un livre : c’est le rêve d’un livre, c’est une idée de livre20 ». Je l’ai lu de manière continue à deux reprises, en 1941 et 1942, puis dans les années quatre-vingt, parce que le club France Loisirs qui avait décidé de publier À la recherche du temps perdu m’avait demandé conseil. Interview de Bernard de Fallois paru dans le Figaro lundi 7 juillet 2008. 19 Voir Lettres à Reynaldo Hahn, éd. Lisez Bernard de Fallois, c’est une brillante introduction pour partir à la recherche de Marcel Proust. Là-dessus, alors que je m’étais découragé et que j’étais prêt à abandonner l’idée d’écrire une thèse sur la formation de la Recherche, parut la biographie de Maurois11, qui allait tout changer. «Il n'y a pas de … Quand cette collection en général – pas seulement pour l’œuvre de Proust –, s’est mise à faire des éditions considérablement annotées, je l’ai regretté parce que cela rendait les livres beaucoup moins maniables. B. de F. – Oui, j’apportais une révélation. Plongez-vous dans le livre Introduction à La Recherche du temps perdu - Suivi de Marcel Proust, Maximes et pensées de Bernard de Fallois au format Grand Format. Lettre adressée, selon Ph. Je pense que Proust a eu l’idée de cette fin à l’occasion d’une soirée musicale chez la princesse de Polignac, quelque temps après la mort de sa mère, une soirée où l’on jouait une œuvre inédite de Reynaldo Hahn, Le Bal de Béatrice d’Este. Pierre Clarac avec la collab. B. de F. – J’ai commencé, naturellement, par les lire in extenso. Si les « Cahiers » préparatoires de la Recherche étaient bien classés, il y avait en revanche, dans le grenier de la belle maison de la rue Dehodencq, des lettres, des articles de journaux, des factures, des faire-part, des brouillons de toutes sortes, des fragments des Plaisirs et les jours, d’autres des Ruskin, souvent déchirés, formant un ensemble assez disparate.Cependant, à mesure que je lisais, j’étais frappé par l’apparition de nombreux morceaux qui avaient en commun la présence d’un personnage nommé Jean, quelquefois aussi Jean Santeuil, formant indiscutablement un ensemble, une sorte de roman autobiographique, mais un roman assez spécial pour que Proust ait pu écrire dans un des feuillets qui ressemblaient à une préface les mots suivants : « Puis-je appeler ce livre un roman ?